Tournée

New Burlesque.

Producteur de télévision parisien à succès, Joachim avait tout plaqué - enfants, amis, ennemis, amours et remords - pour repartir à zéro en Amérique à l’aube de ses quarante ans. Il revient avec une tournée de strip-teaseuses «New Burlesque» à qui il a fait fantasmer la France… Paris !
De port en port, l’humour des numéros et les rondeurs des filles enthousiasment les hommes comme les femmes. Et malgré les hôtels impersonnels, leurs musiques d’ascenseurs et le manque d’argent, les showgirls inventent un monde extravagant de fantaisie, de chaleur et de fêtes. Mais leur rêve d’achever la tournée en apothéose à Paris vole en éclats : la trahison d’un vieil «ami» fait perdre à Joachim la salle qui leur était promise. Un bref aller et retour dans la capitale s’impose, qui rouvre violemment les plaies du passé...

Mathieu Amalric tient une place à part dans mon coeur de cinéphile. Parmi sa prestigieuse filmographie, j'ai en mémoire deux chefs d'oeuvre : "Le Pont des Arts" d'Eugène Green (2004) et "La Question Humaine" de Nicolas Klotz (2007). Pour son quatrième film, il chevauche un terrain nouveau et original en nous proposant un road-movie français d'une troupe d'effeuilleuses du New Burlesque, à la fois joyeux et mélancolique.

Déjà, en choisissant ces femmes épatantes, Mathieu Amalric prend le contre-pied de la beauté formaté des publicitaires, et il le fait avec une très grande tendresse. Sa réalisation est sobre et efficace, très respectueuse du travail élaboré par ces femmes, côté cour comme côté jardin, et il nous invite à regarder les rapports entre le show et la vie, à observer le "spectacle vivant" avec une caméra toujours bien placée, tantôt au plus près des effeuilleuses, tantôt embrassant la totalité de leurs performances.

Et Joachim (Mathieu Amalric) de se débattre, avec une réelle énergie punk et contestataire, pour présenter ce manifeste de la liberté, du droit à une certaine excentricité. Parallèlement à son travail, il y a son rôle de père, qu'il peine à assumer dans le cadre de cette tournée, laissant souvent ses deux fils à leur solitude. Et là, Mathieu Amalric est magistral, comme il le fut déjà dans "Rois et Reine" d'Arnaud Desplechin (2004).

On apprécie aussi tous les moments d'intimité et les mini-rencontres, dans une station-service ou dans un supermarché (épatante Anne Benoît dans le rôle de la caissière !).

Mais le film ne serait rien sans ces femmes, ces effeuilleuses du New Burlesque, à qui il convient de rendre hommage : Miranda Colclasure (Mimi Le Meaux), Suzanne Ramsey (Kitten on the keys), Linda Moracini (Dirty Martini), Angela de Lorenzo (Evie Lovelle), Julie Ann Muz (Julie Atlas Muz), sans oublier le seul effeuilleur de la troupe, Alexander Craven (Roky Roulette) : leur générosité brûle tout sur leur passage, et c'est magnifique.

"Tournée" laisse une empreinte charnelle et émotionnelle indéniable. C'est une joie pour le coeur, les yeux, l'esprit. Drôle, poétique, émoustillant, désespérant, insolant, mélancolique : éblouissant !