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La Vie ChonChon
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29 juillet 2010

Carlos

CarlosCarlos le complexe.

Véritable mythe, Carlos est au coeur de l’histoire du terrorisme international des années 1970 et 1980, de l’activisme propalestinien à l’Armée rouge japonaise. A la fois figure de l’extrême gauche et mercenaire opportuniste à la solde des services secrets de puissances du Moyen-Orient, il a constitué sa propre organisation, basée de l’autre côté du rideau de fer, active durant les dernières années de la guerre froide. Le film est l’histoire d’un révolutionnaire internationaliste, manipulateur et manipulé, porté par les flux de l’histoire de son époque et de ses dérives. Nous le suivrons jusqu’au bout de son chemin, relégué au Soudan où la dictature islamiste, après l’avoir un temps couvert, l’a livré à la police française. Personnage contradictoire, aussi violent que l‘époque dont il est une incarnation, Carlos est aussi une énigme.

Même si Olivier Assayas a écrit d'assez bons scénarios pour André Téchiné ("Rendez-vous" en 1984, "Le lieu du crime" en 1985, et "Alice et Martin" en 1998) je n'ai jamais été un aficionado de son cinéma. Depuis "Désordre" en 1986 à "Clean" en 2008, en passant par "Irma Vep" en 1996 ou "Demonlover" en 2002, j'ai toujours trouvé son cinéma immature. Avec une réserve toutefois, "L'heure d'été" en 2008. Force est de constater qu'avec "Carlos", on passe à tout autre chose.

A l'origine, il s'agit d'une série qui dure 5 heures, diffusée sur Canal+ en mai 2010. Il est évident qu'un film qui en supprime près de la moitié tronque de nombreuses choses, notamment sur sa formation, son réseau et l'étoffe dramatique de ses compagnons. Pour autant, c'est une réussite.

C'est une chronique politique très dense, et palpitante, où la marche du monde l'emporte sur l'intime (c'est suffisamment rare pour être souligné) et qui dresse le fascinant portrait du terroriste. Cette chronique est rythmée, documentée, et elle tient hautement la comparaison avec ce qu'il se fait de mieux dans le genre, notamment aux Etats-Unis.

Le film oscille entre des accélérations percutantes et des moments d'accalmie, privilégiant la réalité immédiate du propos, et évitant la pesanteur des reconstitutions historiques strictes. On y comprend que mieux les enjeux biographiques et politique, d'autant plus que la mise en scène est animée d'une énergie "rock" de la vie d'un terroriste. Le film est puissant, percutant et vigoureux.

Je ne saurais passer outre la distribution : Alexander Scheer (Johannes Weinrich), Nora Von Walderstätten (Magdalena Kopp), Ahmad Kaabour (Waddie Haddad) et tous les autres sont excellents. Mais surtout, il faut compter avec Edgar Ramirez, magnifique acteur vénézuélien. Il n'avait précédemment joué que dans "La vengeance dans la peau" de Paul Greengrass en 2007, et dans "Che" de Steven Sorderberh en 2009. Edgar Ramirez a une stature impressionnante, et il est le véritable métronome du film, jusque dans sa délicate mutation physique qui n'a rien de la simple "performance". Son incarnation de Carlos était digne d'un Prix d'interprétation masculine au Festival de Cannes.

La réussite du film est entière. La déchéance physique du personnage, véritable monstre médiatique, opportuniste sauvage, produit de la puissance de la globalisation, du capitalisme, et de leurs effets pervers sur les utopies gauchistes.

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