Prix Constantin 2011

Ce soir à l'Olympia sera donc remis le "Prix Constantin". Et puisque parmi les dix artistes (et les dix albums, donc) en compétition, il y en a deux que j'aime particulièrement, pour des raisons différentes, je profite de l'occasion pour les mentionner.

Je reproduis ici la description des deux albums telle qu'elle est publiée sur le site http://www.prixconstantin.com site sur lequel vous pourrez retrouver les huit autres postulants, et la description de leur travail.

Cyril Mokaiesh : "Du Rouge et des Passions"

Est-ce qu'on a tout dit quand on a répété qu'il y a beaucoup de Léo Ferré dans Cyril Mokaiesh ? La révolte, l'amour du verbe, l'ambition du propos, la majesté de la musique, cela fait penser évidemment aux Anarchistesou à Poètes vos papiers, vastes vertiges politico-artistiques des alentours de Mai 68. Mais, avec l'album Du rouge et des passions, Cyril Mokaiesh n'a pas fait oeuvre de nostalgique des temps héroïques de la chanson pensante et engagée.

Au contraire, il écrit avec le regard d'un artiste âgé de vingt-six ans ici et maintenant : la colère devant la merchandisation du monde et l'obsession de divertissement, le body count des naïvetés perdues, l'envie de restaurer la capacité à s'envoler...

Cyril Mokaiesh a rencontré un complice parfait en la personne de Philippe Uminski. Arrangeur et réalisateur aux compétences encyclopédiques (outre ses propres disques, on l'a connu derrière Calogero ou la Grande Sophie), celui-ci retrouve la ferveur des légendaires arrangements des disques de Jacques Brel en faisant fructifier l'héritage de Tindersticks ou de Divine Comedy. Avec lui, les paroles, les mélodies et la voix de Cyril Mokaiesh sont portées à incandescence... et la presse s'emballe, heureuse qu'une parole aussi forte surgisse enfin dans le paysage de la chanson française.

À la fois pop et politique, Cyril Mokaiesh réalise la synthèse d'héritages dont on a souvent entendu dire qu'ils étaient incompatibles. Avec cette synthèse inattendue, il restitue le frisson que connaissaient les ondes au temps d'Hexagone de Renaud ou de Noir et blanc de Bernard Lavilliers, quand c'est le coeur d'une génération ou d'un pays qui bat dans un refrain, quand la chanson se fait soudain mieux que belle : utile.

www.cyrilmokaiesh.com

Alex Beaupain : "Pourquoi battait mon Coeur"

Il fallait un esprit singulier pour comparer l'histoire de la gauche en France depuis 1981 avec la vie d'un couple. Et Au départ, le premier single du nouvel album d'Alex Beaupain, s'est révélé être une des chansons les plus réussies de l'année. Ce chanteur n'est-il pas passé par Sciences-Po Paris, comme Léo Ferré et Camille ?

Mais si on parle souvent d'Alex Beaupain comme d'un chanteur à la trajectoire singulière, c'est qu'il est le plus engagé dans la création cinématographique. Son compagnonnage avec le réalisateur Christophe Honoré est unique et nourrit inlassablement sa création : il lui a donné des chansons pour 17 fois Cécile Cassard, Dans Paris, Les Chansons d'amour et Les Bien-aimés, outre des bandes originales instrumentales pour quelques autres films. Et l'aller-retour est constant entre sa vie qui inspire ses chansons, ses chansons qui inspirent Honoré, Honoré qui suscite des chansons... Il n'est pas sans conséquences de faire chanter à l'écran Catherine Deneuve et Chiara Mastroianni : on sait faire voler les mots, on sait faire scintiller les sentiments, on sait être aussi chatoyant que profond.

Le troisième album d'Alex Beaupain, Pourquoi battait mon coeur, est de cette même teneur rêveuse et crue à la fois. Un romantisme doux-amer, des chansons d'amour sale et des chansons de sexe innocent, des mélancolies se transformant en hédonisme furieux... Naviguant entre légèreté et gravité, Alex Beaupain retrouve l'alchimie singulière de certains classiques d'Alain Souchon ou Etienne Daho, quand ils prétendent ne plus croire au grand amour pour pouvoir le rechercher plus tranquillement. Alors, on est bouleversé. Cela s'appelle la grâce...

www.alexbeaupain.com