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27 mai 2013

Alata - Out in the Dark

Alata

Un amour impossible ?

Nimer Mashrawi (Nicholas Jacob, un charme à couper le souffle), un étudiant palestinien en psychologie réfugié clandestinement, malgré lui, à Tel-Aviv, rêve d’une vie meilleure à l’étranger. Une nuit, où il est dans un bar gay avec son ami Mustafa Na'ame (Loai Nofi, bouleversant) il rencontre Roy Schaefer (Michael Aloni), un jeune avocat israélien issu de la bourgeoisie. Ils s’éprennent l’un de l’autre.

Au fil de leur relation, Nimer est confronté aux réalités cruelles de la communauté palestinienne – qui rejette son identité – et de la société israélienne – qui ne reconnaît pas sa nationalité. Sur fond de lutte familiale, notamment avec son frère aîné Nabil (Jamil Khouri), politique et sociale (Nabil participe en cachette à la lutte armée contre l'Israël), Nimer doit choisir entre son désir d’ailleurs et son amour pour Roy.

Deux choses m'encourageaient a priori d'aller voir "Alata" : le synopsis me rappelait beaucoup celui de "The Bubble" de Eytan Fox (superbe !) ; j'avais beaucoup aimé un précédent film de Michael Mayer, "La maison du bout du monde" en 2007 avec Colin Farrell, Robin Wright et Dallas Roberts. Et bien que le film ne soit distribué que dans deux salles à Paris, et que mon "planning" était chargé ce week-end, je tenais à y aller. Je n'ai pas été déçu !

D'évidence, après avoir vu le film, je peux confirmer que "Alata", centré sur la romance interdite entre deux hommes en plein conflit au Moyen Orient, s'inscrit dans la lignée de films comme "Yossi et Jagger" qui dépeignait l'histoire d'amour de deux officiers de l'armée israélienne, et de "The Bubble" qui décrivait la vie de la jeunesse de Tel Aviv, entre son ébullition politique et l'histoire d'amour impossible entre un Israélien et un Palestinien, deux films de Eytan Fox.

Notons en passant que "Alata" a récolté le prix du Meilleur Film au Festival International du Film d'Haifa, une manifestation cinématographique majeure en Israël. Un prix amplement mérité.

Le film est très resserré. La caméra de Michael Mayer ne s’égare pas en fioritures. Il filme de façon crue, directe, en lumière naturelle, une violence omniprésente, masquée ou éclatante. C'est un bon film où tout ce qui distrait l'oeil réveille l'esprit, interroge et émeut. Sans cliché, notamment pour tout ce qui concerne ses aspects les plus politiques, relatifs aux conflits entre Israéliens et Palestiniens, depuis les services secrets (à ce titre le chantage qui est fait à Nimer pour qu'il obtienne un laisser-passer pour suivre normalement ses cours à l'université de Tel Aviv est particulièrement ignoble) jusqu'à la lutte armée des Palestiniens (à ce titre, la mort de Mustafa, considéré comme un traître par les siens, glace le sang).

Le film échappe donc à la banalité grâce au contraste entre l'histoire d'amour très sentimentale d'un côté, et l'environnement oppressant dans lequel l'homophobie est mise au service des forces en présence de l'autre côté.

Michael Mayer saisit des personnages convaincants, attachants, qui apportent une part de réalité intéressante, notamment grâce à une direction d'acteurs très fine, surtout dans les moments les plus tendus, au premier rangs desquels on trouve le rôle des services secrets israéliens et l'attitude homophobe aussi glaçante que déterminée des Palestiniens.

Nicholas Jacob

Michael Aloni

Le film ne serait pas ce qu'il est sans ses principaux interprète. Sur la photographie de gauche, Nicholas Jacob (Nimer), qui est aussi réalisateur et scénariste, parvient à alterner des scènes très douces où il convient d'exprimer la douceur et la profondeur des sentiments et des scènes de colère - rentrée comme exprimée - face à l'environnement politique qui le contrait à vivre autrement qu'il le souhaite. Il est très beau, avec un regard parfois presque enfantin, mutin même lorsqu'il doit exprimer sa complicité toujours grandissante avec Roy. Sur la photographie de droite, Michael Aloni (Roy) n'est quant à lui pas un inconnu, puisqu'il joua dans "Infiltration" de Dover Kasashvill puis surtout dans l'excellent "Le Policier" de Nadav Lapid en 2011, un film que je conseille vivement. Il est tantôt déboussolé, tantôt déterminé face à cette administration israélienne qui l'empêche de vivre pleinement son amour.

Enfin, on retrouve Jamil Khouri (Nabil, le frère de Nimer) déjà vu dans "Les Citronniers" de Eran Riklis en 2008 ; et on retrouve surtout l'admirable Loai Nofi, lui aussi acteur dans "Les Citronniers", mais aussi dans "Une bouteille à la mer" de Thierry Binisti en 2010, puis dans "Zaytoun" de Eran Riklis en 2012, qui, si ce ne sont pas deux films qui m'ont particulièrement touchés, ne touchent en rien la qualité de l'interprétation de l'acteur. Ici, en Mustafa, délicieuse folle contrainte pour vivre de céder au chantage des services secrets israéliens, il est bouleversant, et son exécution reste une des scènes clefs du film.

"Alata" est donc une double tragédie : l'interdit amoureux que vivent Nimer et Roy et l'impossibilité qu'ont de s'entendre Palestiniens et Israéliens. Et la question que pose le film, cruelle s'il en est, reste de savoir si l'amour permet de passer outre le décor politique. Et je vous laisse aller voir la réponse (une réponse "ouverte" me semble-t-il) que propose Michael Mayer.

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