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5 avril 2009

Frost/Nixon, l'heure de vérité.

Frost_NixonAffrontement, face caméra.

En 1977, l'interview télévisée de l'ancien Président Richard Nixon menée par David Frost a battu le record d'audience de toute l'histoire du petit écran américain pour un magazine d'actualités. Plus de 45 millions de personnes ont assisté à un fascinant affrontement verbal au fil de quatre soirées. Un duel entre deux hommes ayant tout à prouver, et dont un seul pouvait sortir vainqueur. Leur affrontement a révolutionné l'art de l'interview-confession, a changé le visage de la politique et a poussé l'ancien Président à faire un aveu qui a stupéfié le monde entier... à commencer sans doute par lui-même.

Ron Howard nous avait habitué aux mastodontes cinématographiques ("Splash", "Willow", "Backdraft", "Apollo 13", "En direct sur Ed TV", "Un homme d'exception", "De l'ombre à la lumière", "Da Vinci Code"), mais pas à cette qualité cinématographique. Car autant le dire tout de suite, c'est ici son meilleur film, et de très loin.

La mise en scène est aiguisée, nette et précise, sans les flonflons qu'affectionne habituellement le réalisateur. Cela tient probablement au fait que c'est l'adaptation d'une pièce de théâtre, elle même adaptée d'une émission de télévision restée dans les mémoires, car historique. Et, hormis une conversation téléphonique - passionnante et réussie - entre Nixon et Frost, tout dans le film est rigoureusement exact. Cela aura contraint, pour notre plus grande satisfaction, Ron Howard à davantage de discipline et de rigueur.

Ensuite, le duel est servi par une excellente distribution au premier rang de laquelle on trouve Franck Langella et Michael Sheen. Voilà deux excellent comédiens de théâtre, passés au cinéma avec succès. Langella dans "La neuvième porte" de Polanski, "Good Night and Good Luck" de Clooney, "Superman Returns" de Bryan Singer ; Sheen dans "Othello" de Oliver Parker, "Mary Reilly" de Stephen Frears, "The Deal" (téléfilm excellent où il incarne Tony Blair), "The Queen"de Stephen Frears (retrouvant le costume de Tony Blair). Tous deux excellents, presque virtuoses, chacun portant un personnage difficile et ambigu avec beaucoup de finesse, endossant les méandres de leurs personnalités complexes respectives avec talent. Ils sont pour beaucoup dans la réussite film, incontestablement.

Puis, des seconds rôles très bien distribués eux aussi, avec Sam Rockwell, Toby Jones, Matthew MacFayden, Kevin Bacon, Oliver Platt, etc... chacun jouant subtilement, à l'opposé de ce que pourraient nous proposer Tom Hanks ou Nicolas Cage, par exemple.

Le film est construit tel un suspense qui va crescendo, presque comme un film de procès, alors même que nous en connaissons les images finales. Et ce gros plan sur Nixon, nous l'attendons avec impatience, avec un intérêt grandissant, et presque goulu. Et c'est tout l'art (pour une fois) de Ron Howard, de s'approcher peu à peu de ses duettistes, ses duellistes devrais-je écrire, guettant chaque regard, chaque souffle, chaque goutte de sueur. Et l'extraordinaire animal politique Nixon tâchant de ne faire qu'une bouchée du petit présentateur TV qui paie de sa poche ces entretiens voués à l'Histoire.

Admirable Franck Langella incarnant un Nixon qui sait peut-être déjà quelle sera sa scène finale, mais qui la retient jusqu'au bout, pour nous la proposer plus vraie que nature, avec une maîtrise et une force rares. Ce dernier gros plan est magistral. Il ne faut jamais désespérer d'un réalisateur, et plus largement, du cinéma. Aller à rebours de l'esbrouffe est un tissage complexe et ardu, à l'opposé de Dolce et Gabanna, mais sur les pas de Martin Marghiella, pour s'éloigner de la vulgate, mais toucher à l'art.

Un grand film. Deux grands acteurs. Du 7ème art.

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