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La Vie ChonChon
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21 juillet 2009

J'ai tué ma mère.

J_ai_tu__ma_m_re Grandir... Hubert Minel n'aime pas sa mère. Du haut de ses 17 ans, il la jauge avec mépris, ne voit que ses pulls ringards, sa décoration kitsch et les miettes de pain qui se logent à la commissure de ses lèvres quand elle mange bruyamment. Au-delà de ces irritantes surfaces, il y a aussi la manipulation et la culpabilisation, mécanismes chers à sa génitrice. Confus par cette relation amour-haine qui l'obsède de plus en plus, Hubert vague dans les arcanes d'une adolescence à la fois marginale et typique -découvertes artistiques, expériences illicites, ouverture à l'amitié, sexe et ostracisme- rongé par la hargne qu'il éprouve à l'égard d'une femme qu'il aimait pourtant jadis. Sorti de nulle par, Xavier Dolan, jeune Québécois de 19 ans, réalise "J'ai tué ma mère". 19 ans ! Il est évident qu'on trouvera là quelques défauts, mais il faut se résoudre à l'évidence, ce gosse a du talent. Le réalisateur assume totalement son narcissisme, et même si parfois ce film autobiographique est maniériste, il est maîtrisé, tant dans la fiction que dans la description saisissante de la réalité quotidienne. Il semble aussi assumer crânement ses choix par une insolence bluffante, et ne craint ni la férocité théâtrale et fougueuse, ni l'hystérie parfois comique. Après une mise en place rigoureuse et assez complexe des personnages, on embarque vers une joute verbale où la mère comme le fils ont décidé d'être intransigeants. Et les thèmes évoqués, identité sexuelle, culpabilité et culpabilisation, indépendance, font de cette chronique de l'adolescence un film tonique, parfois même violent. Non seulement Xavier Dolan est doué, mais en plus, il est un excellent comédien, décidé à ne pas transiger. Il est parfaitement secondé, dans le rôle de sa mère, par Anne Dorval (connue au Québec pour jouer dans une série TV), qui assume sa partition elle aussi hystérique à certains moments, avec brio. Plus discret, dans le rôle d'Antonin, le petit ami d'Huber, on découvre François Arnaud (23 ans) tout juste sorti du conservatoire, qui tire parfaitement son épingle du jeu, dans un rôle plus effacé. Il a déjà joué dans quelques publicité et au théâtre, notamment avec Michel Marc Bouchard à qui l'on doit "Les Féluettes" (devenu "Lilies" pour la télévision canadienne. Excellente référence. Formellement, on sent la référence à Wong Kar Waï et à Gus Van Sant. La leçon est parfaitement maîtrisée, elle aussi. Xavier Dolan joue sur plusieurs supports, cinéma, caméra vidéo, et même vieux films d'enfance en Super 8. Peu probable que ce film parvienne à rencontrer un large public au-delà des cinéphiles. Pourtant, même si on sent de nos jours une étrange méfiance (voire même une crainte) à l'endroit de la jeunesse, il faut aller voir "J'ai tué ma mère". Personnellement, j'espère vivement que Xavier Dolan saura transformer ce prodigieux essai cinématographique. Ce règlement d'un oedipe particulièrement hystérique, qui semble ne se terminer que par la résignation d'Hubert, restera un film qui m'aura touché, très probablement parce que moi aussi, dans ma jeunesse, et contrairement à ce que préconisait le très surestimé Freud, "j'ai tué ma mère".
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