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La Vie ChonChon
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15 avril 2011

Rabbit Hole

Rabbit_HoleFaire le deuil.

Huit mois après la disparition de leur fils, Becca et Howie redonnent peu à peu un sens à leur vie. Howie tente de nouvelles expériences tandis que Becca préfère couper les ponts avec une famille trop envahissante. Contre toute attente, elle se rapproche du jeune homme responsable de la mort de leur enfant. Cette relation étrange va permettre à Becca d'être enfin en paix avec elle-même.

Autant le dire tout de suite, c'est sur le seul nom de John Cameron Mitchell, le réalisateur, que je suis allé voir ce film. J'étais curieux de voir comment le génial réalisateur de "Hedvig & the Angry Inch" (2001) et de "Shortbus" (2006), des clips pour Bright Eyes ou Scissor Sisters, après avoir été aussi le judicieux producteur du sublime "Tarnation" de Jonathan Caouette (2004) allait réussir, ou non, dans son incursion dans un cinéma plus classique. 

A priori, ni le sujet, ni la distribution n'avaient de quoi susciter un élan particulier de ma part. Mais j'ai continué de faire confiance à ce réalisateur exceptionnel, et je n'ai pas eu tort. Ici donc, il scrute tous les états successifs du deuil, avec finesse et parfois humour. Il ausculte un père et une mère vivant leur deuil à front renversé, le père souhaitant rester "avec" le fils disparu, la mère souhaitant, même difficilement, tourner la page. Ces deux cheminements sont filmés de façon presque clinique, où la sobriété de la forme correspond à la sobriété de l'émotion.

On est toujours sur le fil du rasoir, ni dans l'hystérie, ni dans le mutisme, et la tension ne baisse jamais, John Cameron Mitchell creusant jusqu'à l'os dans la chair des personnages, qui, exsangues, finissent par se demander s'il y a une limite à la douleur, et même s'il n'y a pas une complaisance à demeurer dans cette douleur. Il y a les conséquences de la mort du fils, mais il y a aussi les conséquences du deuil, et le séisme qu'il impose à chacun. La force du film reste de distiller un malaise subtil à cause de l'exaspération qu'on ressent parfois face à ces parents affligés.

La distribution est excellente. Nicole Kidman revient à un niveau qu'on avait presque oublié tant elle a enchaîné les navets. Le réalisateur parvient même à faire une métaphore intelligente entre le passage à vide de l'actrice dans sa carrière, et le deuil du personnage qu'elle incarne. 

Aaron Eckart, l'acteur fétiche de Neil LaBute qui a déjà joué sous la direction, entre autres, de Oliver Stone, Steven Soderbergh, Dean Penn, Ron Howard, John Woo, Christopher Nolan... qui a été révélé au grand public en 2006 simultanément dans "Thank you for smocking" de Jason Reitman et "Le Dahlia Noir" de Brian De Palma. Il est impeccable en père déboussolé qui se raccroche à tous les souvenirs (photos, vidéos, dessins, jouets, siège-auto...) de son fils disparu.

Les seconds rôles sont confiés à des acteurs épatants, venant souvent de séries TV : Dianne West n'a rien à prouver, elle reste impeccable, oscillant entre la drôlerie et l'émotion ; Tammy Blanchard (NY Unité Spéciale ; NY Section Criminelle ; The Good Wife) en soeur de Nicole Kidman est parfaite et sa carrière devrait décoller puisqu'elle joue dans 4 films qui vont sortir prochainement ; Jon Tenney (The Closer - LA enquêtes prioritaires) est "le bon copain" très convainquant ; Sandrah OH (Grey's Anatomie) est superbement agaçante dans les réunion de thérapie de groupe pour parents ayant perdu un enfant, et sincèrement amusante quand elle fume du shit dans sa voiture.

Quant à Miles Teller, dans le rôle difficile de l'adolescent qui a causé accidentellement la mort du fils de Becca et Howie, il est très intéressant, tout en réserve, larme à l'oeil et sourire au bord des lèvres. Sa retenue déchirante contient tout le propos du film.

Si selon moi le film n'est pas suffisamment ancré dans une réalité sociale qui mériterait un ton un peu satirique, le réalisateur parvient quand même à rendre ses personnages aussi attachants qu'exaspérants, et Nicole Kidman comme Aaaron Eckart savent incarner deux cheminements de deuil avec sobriété, dans un drame très bien tenu.

Il n'en demeure pas moins que je souhaite vite revoir John Cameron Mitchell m'entraîner dans la flamboyance et le tourbillon de "Hedwig" et "Shortbus".

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