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La Vie ChonChon
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6 novembre 2011

Love and Bruises

Love_and_BruisesDe l'amour et des bleus.

Hua, étudiante chinoise, habite à Paris depuis peu. Un jour, elle rencontre Mathieu, un jeune ouvrier un peu voyou à ses heures, qui tombe amoureux d’elle. Commence alors une histoire d’amour intense et passionnelle. Cette relation déstabilise Hua qui décide de repartir en Chine. Jusqu’à ce qu’elle prenne conscience de l’importance qu’a prise Mathieu dans sa vie.

Non, le n'irai pas non plus voir "La source des femmes", même si comme "Intouchables" on essaie de nous le sur-vendre par moins-disant médiatique interposé.

Puisque j'ai beaucoup aimé les excellents "Une jeunesse chinoise" (2007) et "Nuit d'ivresse printanière" (2010), les deux précédents films de Lou Ye, je suis allé voir "Love and Bruises", dont le titre déjà a retenu mon attention.

Il s'agit d'une histoire d'amour violente et destructrice dans le Paris, quartier Belleville, d'aujourd'hui, filmée avec l'exceptionnel talent de Nelson Yu Lik-wai, le directeur de la photographie de Lou Ye, qui avec sa caméra à l'épaule, reste au plus près des protagonistes. Nous assistons à un corps à corps explosif entre une étudiante chinoise et un jeune ouvrier à fleur de peau. Avec sa caméra agitée, il capte les instants en rafales, presque comme s'il s'agissait de scènes de fusillades. Etonnant.

L'homme peut-il conquérir sa libération par le sexe ? On songe à une thématique souvent abordée dans le cinéma chinois et sud-coréen, qui poussent parfois les relations sexuelles à un degré de violence particulièrement fort. Or a mon sens, Lou Ye en a trop fait dans la quantité, et ces scènes sont trop nombreuses, au détriment de la qualité, puisque ces scènes sont absurdement trop pudiques.

Pour autant, nous avons le plaisir de découvrir Corinne Zam (Hua) une jeune actrice qui assume un rôle très difficile, entre le consentement à cette relation exaltée et l'aspiration à une libération plus paisible. J'espère la revoir bientôt.

Tahar Rahim (Mathieu) confirme son magnétisme, sa force tellurique presque volcanique. Remarqué dans la série "La Commune" (2007) pour la télévision, littéralement "révélé" dans "Un prophète" de Jacques Audiard (2009), il poursuit son implantation dans le cinéma français. En 2011, l'année de ses 30 ans il aura été dans "L'aigle de la Neuvième Légion" de Kevin Macdonald, "Les hommes libres" de Ismaël Ferroukhi et bientôt dans "Or Noir" de jean-Jacques Annaud. Mais surtout je l'attends dans "Aimer à perdre la raison" de Joachim Lafosse où il donnera la réplique à Gérard Depardieu, Niels Arestrup et Emilie Dequenne, ce Jochim Lafosse à qui nous devons le superbe "Nue Propriété".

Avec plaisir, je retrouve Jalil Lespert (Giovanni), meilleur de film en film. En malfrat de seconde zone qui aime frimer et flamber, il est excellent. Il s'est définitivement inscrit dans le cinéma français grâce à de très bons choix depuis "Ressources Humaines" de Laurent Cantet en 2000 : "Vivre me tue" de Jean-Pierre Sinapi, "Pas sur la bouche" de Alain Resnais, "L'ennemi naturel" de Pierre Erwan Guillaume", "Le promeneur du Champ de Mars" de Robert Guédiguian, "Le petit lieutenant" de Xavier Beauvois, "Pigalle, la nuit" la série TV de canal+, et l'excellent "Lignes de front" de Jean Christophe Klotz : une décennie pour un parcours que beaucoup peuvent envier, à la mesure de son talent. Il est aussi passé derrière la caméra avec "24 mesures" en 2007, et il y retourne pour "Des vents contraires" et "Eastern" que j'attends déjà.

Et je retrouve aussi Vincent Rottiers (Eric, un collègue et ami de Mathieu) dont je ne cesse de souligner la belle présence. Dans un rôle plus en retrait, il dresse par petites touches le portrait d'un jeune ouvrier en France. A 16 ans déjà, en 2002, il imposait sa présence dans "Les diables" de Christophe Ruggia, et figure aux génériques de "Le Passager" de Eric Caravaca, "Les deux rives du serpent" de Hélier Cisterne, "L'ennemi intime" de Florent Emilio Siri. 2009 fut "son" année : "Je suis heureux que ma mère soit vivante" de Nathan & Claude Miller, "A l'origine" de Xavier Giannoli, et le passionnant "Qu'un seul tienne et les autres suivront" de Lea Fehner. Il y a quelques mois, il prouvait encore tout son talent dans "Avant l'aube" de Raphaël Jacoulot face à un Jean-Pierre Bacri au meilleur de sa forme.

"Love and Bruises" est un film rugueux, fiévreux, peu aimable. Malgré ce que je considère comme un "pas assez" parce qu'il ne pousse pas jusqu'au bout son parti-pris violent, le film reste intéressant pour plusieurs raisons : sa caméra à l'épaule virtuose (accrochez-vous, ça tangue !), sa façon de nous bousculer, son évocation du Paris populaire et ouvrier, l'esquisse d'une société déboussolée, l'ébauche de relations sociales difficiles, son analyse d'un sexe libérateur et destructeur, et enfin sa distribution et la qualité d'interprétation de Tahar Rahim, Corinne Zam, Jalil Lespert et Vincent Rottiers, acceptant des rôles difficiles aux antipodes des "douceurs" sur-vendues actuellement à un large public.

L'amour et le sexe sont aussi corrida loin de l'eau de rose, parce que vivre est aussi une guerre dans la société actuelle.

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