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12 décembre 2011

Carnage

CarnageQuand le vernis social éclate...

Dans un jardin public, deux enfants de 11 ans se bagarrent et se blessent. Les parents de la "victime" demandent à s'expliquer avec les parents du "coupable". Rapidement, les échanges cordiaux cèdent le pas à l'affrontement. Où s'arrêtera le carnage ?

Après l'excellent "Ghost Writer", Roman Polanski nous propose un exercice de style sous la forme d'une comédie sarcastique et brillante, d'après la pièce de Yasmina Reza "Le Dieu du Carnage" (2006) avec qui il a co-écrit l'adaptation pour le cinéma. Il confirme que "l'enfer, c'est les autres" et que la politesse dans les rapports humains n'est souvent qu'une façade. En faisant s'affronter deux couples, l'un "grand bourgeois", l'autre "bobo de gauche", il se livre à un jeu de massacre qui porte une part d'étude sociologique, et qui scrute la nature humaine. Il fait éclater le vernis social, et décapite les non-dits, les frustrations, les faux-semblants du "jeu social" dans un cadre théâtral parfaitement approprié.

Il s'agit d'une co-production France-Espagne-Pologne-Allemagne - les producteurs étasuniens bouderaient-ils Roman Polanski ? -tournée à Bry-sur-Marne où un appartement de Brooklyn à New-York est reconstitué par le brillant chef décorateur Dean Tavoularis ("Le Parrain", "Apocalypse Now"), pour nous livrer un huis-clos, sans pause ni ellipse, cadre dans lequel excelle le réalisateur : "La jeune fille et la mort" (1965) ; "Répulsion" (1966) ; "Rosemary's Baby" (1968) ; "Le Locataire" (1976).

Le quatuor d'acteurs est excellent. Chacun dans sa partition Jodie Foster, Kate Winslet, Christoph Waltz et John C. Reilly embrasse son rôle avec un réel engagement et un plaisir évident. Leur jeu confine à la jubilation.

Christoph Waltz, comédien autrichien formé par Lee Strasberg et Stella Adler a fait une longue carrière à la TV en Autriche et en Allemagne avant de s'aventurer à Hollywood. Ce furent d'abord les tentatives "Ordinary descent criminal" de Thaddeus O'Sullivan (2000) et "Pacte avec le diable" de Allan A. Goldstein (2001) avant que n'intervienne l'explosion de sa carrière avec "Inglourious Basterds" de Quentin Tarentino en 2009 et "The Green Hornet" de Michel Gondry (2010), puis les anecdotiques "De l'eau pour les éléphants" de Francis Lawrence, et "Les Trois Mousquetaires" de Paul W. Anderson. Il retrouvera bientôt Quentin Tarantino pour "Django Unchained". Collé à son téléphone portable parce qu'il est un grand avocat qui ne cesse jamais de travailler, il est agaçant à souhaits.

John C. Reilly est un acteur que j'apprécie particulièrement dont la carrière, même s'il s'agit souvent de "seconds rôles" contien de quoi faire pâlir des comédiens plus célèbres : "Outrages" de Brian De Palma (1990), "Ombres et Brouillard" de Woody Allen (1992), "Gilbert Grape" de Lasse Hallström (1994), "Boogie Nights" de Paul Thomas Anderson (1998), "La Ligne Rouge" de Terrence Malick (1999), "Magnolia" de Paul Thomas Anderson (2000), "Chicago" de Rob Marshall (2003) qui lui valut une nomination aux Oscar, "The Hours" de Stephen Aldry (2003), "Gangs of New York" de Martin Scorsese (2003), "Aviator" de Martin Scorsese (2005), "The Last Show" de Robert Altman (2006), et le très récent "We need to talk about Kevin" de Lynn Ramsay. Encore une fois, en époux mené à la baguette par Jodie Foster, il excelle.

Jodie Foster, dont le talent n'est plus à démontrer, est parfaite dans son rôle de femme confinée dans ses certitudes, hypocrite à souhaits lorsqu'elle affirme vouloir être conciliante alors qu'elle n'entend pas faire le moindre pas vers la conciliation qu'elle prétend vouloir menée. Elle va jusqu'à l'absurde devant ses livres d'art en particulier et son matérialisme en général.

Et je voudrais dire mon plaisir à retrouver Kate Winslet, excellente comédienne britannique dont la carrière aura été injustement "étouffée" par son rôle dans le "Titanic" de James Cameron, alors même qu'elle a joué pour Ang Lee, Peter Jackson, Michael Winterbottom, Kenneth Branagh, Jane Campion, Michel Apted, Alan Parker, Michel Gondry, Marc Foster, John Turturro, Sam Mendes, Steven Soderbergh. Elle prouve ici, en épouse BCBG de Christoph Waltz qu'elle dispose aussi d'une palette comique très étendue, n'hésitant jamais à se ridiculiser dans des situations embarrassantes.

Roman Polanski nous dit en substance que nous sommes tous potentiellement monstrueux. La maestria de sa mise en scène est à couper le souffle, d'autant que l'exercice du huis-clos est très difficile. Son jeu de massacre est jouissif, violent, cruel et très drôle, mené à un rythme qui ne ralentit jamais, ciselé par des dialogues brillants et servis par des comédiens au meilleur de leur art. Même le plan de fin est un pied de nez fait aux "convenances sociales" des adultes.

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