Orphée

Yann Bridard.

Non, ce n'est pas là le nom d'une vedette, d'un "people", comme on dit. Il s'agit d'un danseur de l'Opéra de Paris, qui vient de triompher dans "Orphée et Eurydice", livret de Willibald von Glück, et ballet de Pina Bausch.

On connaît cette histoire d'amour, entre Orphée et Eurydice. Ils s'aiment, elle meurt, Zeus autorise Orphée à aller la chercher au royaume des morts. Orphée devra défier le Cerbère, et avec sa lyre et sa musique convaincre Pluton de le laisser repartir avec Eurydice. Cette faveur lui sera accordée, mais il ne devra plus jamais la regarder, sous peine de la voir mourir, définitivement cette fois.

La musique est bouleversante, le ballet ne l'est pas moins. Et il y a ce final, si âpre, si douloureux, où Orphée est submergé par son chagrin. Et le corps de Yann Bridard qui se tord, se convulse presque, porté par les trois danseurs qui donnent vie au Cerbère, est absolument magnifique. C'est, lorsqu'ils le posent à terre, aussi beau qu'une descente de croix peinte par Caravage ou Rembrandt. Et sur cet air inoubliable de Glück, on frémit au rythme de ce corps que la vie abandonne peu à peu. Ce corps si beau qu'on le voudrait éternel.

Souvent la danse sublime le corps de l'homme, ici d'un simple caleçon beige vêtu, (tandis qu'Eurydice est en rouge), et Yann Bridard porte avec une infinie sensibilité tout le chagrin, la douleur, le pathétique et le tragique de sa situation face à l'amour perdu. Il est remarquable.