Madeleine Vionnet

La Reine de la Mode. Madeleine Vionnet (1976-1975) est peu connue du grand public. Pourtant, nombre de grands couturiers se réclament d'elle aujourd'hui, depuis Miyake jusqu'à Yamamoto, depuis Alaïa jusqu'à Westwood, depuis Ford jusqu'à Galliano, depuis Jean-Paul Gaultier jusqu'à Christian Lacroix. En leur temps, Christian Dior et Yves Saint Laurent évoquaient Madeleine Vionnet comme une inspiratrice majeure. Peu à peu le temps lui rendra sa place dans l'histoire de la mode. Quelle femme ! Elle travailla dès ses 12 ans. A 20 ans, alors que c'était impensable à l'époque, elle quitta son mati, son travail, son Paris, pour aller travailler en Angleterre, parfaire ses dons pour la couture. Quelle visionnaire ! Alors qu'elle était incessamment copiée, elle attaqua les contrefacteurs en justice, gagna son procès, et venait de créer le "copyright" dans le domaine de la mode. A chaque modèle, elle apposait sa griffe, un numéro de série et son empreinte digitale. Quelle réformatrice ! Quelle progressiste ! Car sa dimension sociale fut absolument incontestable en son temps : elle fit remplacer les tabourets de ses couturières par des chaises, elle créa un réfectoire et une crèche dans son atelier, elle embaucha un médecin et un dentiste à demeure pour son personnel, et elle offrit des vacances à ses salariés, bien avant les congés payés ! Quelle couturière ! En premier lieu, c'est elle qui supprima le corset (et non pas Paul Poiret, ni même Gabrielle Chanel). En second lieu, elle osa la coupe en biais, ce qui lui permit de proposer dès le début du XXème siècle des modes intemporelles, indémodables. Sans ostentation (elle n'aimait guère la vie luxueuse) elle aida aussi les designers de son temps : Chareau, Franck, Jourdain, Herbst, Dunand. Incontestablement, cette femme avait un goût très sûr, parfaitement aiguisé. Fascinée par le corps de la danseuse Isadora Duncan et la liberté de son corps, elle maîtrisa chaque tissu, chaque dentelle, chaque velours épilé poil à poil, pour construire des robes incroyables, répondant cependant à des formes simples. Reine incontestée des robes drapées comme des robes près du corps, c'est bien Madeleine Vionnet qui inventa la couture du XXème siècle. Toute sa vie elle fut une créatrice pleine d'audace, osant toujours exprimer une sensualité et une volupté uniques. Ses concurrents de l'époque, Paul Poiret, Elsa Schiaparelli, Jeanne Lanvin, et même Gabrielle Chanel étaient fascinés par son immense talent. Son art de la coupe est, dit-on, resté inégalé. Je suis un grand admirateur de "l'oeuvre" de Madeleine Vionnet, et j'espère que cette exposition contribuera à lui offrir enfin la place qu'elle mérite dans l'histoire de la mode. N'hésitez-pas, et si vous passez à Paris, visitez cette exposition unique. Magnifique exposition au Musée des Arts Décoratifs (rue de Rivoli à Paris, jusqu'au 10 janvier 2010), présentant 120 modèles absolument parfaits, replaçant Madeleine Vionnet à sa place : une des toutes premières. Car, incontestablement, devant Chanel et Yves Saint Laurent, elle reste la très grande reine de la couture.