Goodbye Solo

Amitié salvatrice ?

Winston Salem, Caroline du Nord. 
Solo, jeune chauffeur de taxi d'origine sénégalaise, est engagé pour une course très spéciale: William, vieil homme sombre et taciturne, lui demande de le conduire deux semaines plus tard au sommet de la montagne "Blowing Rock". Sans retour. 
Bien décidé à lui faire changer d'avis, Solo décide d'entrer dans la vie de William en devenant son chauffeur attitré. Il espère ainsi garder un oeil sur lui et découvrir ses secrets. 
Pour William, le vieux rocker sudiste, le Rêve américain n'est plus qu'un passé amer, pour Solo c'est encore une promesse d'avenir. Malgré leurs différences les deux hommes vont apprendre à s'apprécier. 
Cette amitié inattendue sauvera-t-elle William ?

Ramin Bahrani, après deux films prometteurs, "Man push cart" en 2006 et "Chop Shop" en 2008, nous présente son film le plus abouti à ce jour. Cet homme à tout faire, américain d'origine iranienne, réalisateur, acteur, scénariste, monteur... parvient a capter les fins-fonds des USA comme ceux de l'âme humaine.

Etant donné le titre du film, on croit deviner la fin dès le départ. Pourtant, c'est bien un étrange suspense auquel on assiste. Le scénario et la mise en scène sont plein de finesse. Le film ne cède à aucun piège sentimental et mélodramatique, et ne sombre dans aucun prêche psychologique inutile.

Ce suicidaire et son bon samaritain, animés d'amitié, d'amour et de compassion, l'un dans toute sa réserve, l'autre dans sa gentillesse expansive, sont atypiques. Et les acteurs qui servent ces personnages le sont tout autant. Souleymane Sy Savane qu'on est réjouit de découvrir, et l'excellent Red West (surtout acteur de séries TV) trop rare au cinéma dont le seul visage raconte toute une vie, tel un paysage humain. Il était remarquable dans "L'Idéaliste" de Francis Ford Coppola en 1998, comme dans le superbe "Cookie's Fortune" de Robert Altman en 1999.

Les sujets qu'aborde le film, la mort, l'amitié, les secrets de famille... sont communs, mais traités ici avec une finesse rare, où chacun des deux visages principaux est un paysage, où chacun des deux paysages (la ville et la forêt) sont deux visages d'une Amérique méconnue.

A moins d'être réticent ou réfractaire à toute poésie, impossible de ne pas être touché par ces deux hommes qui prennent le temps de nouer des liens amicaux serrés, malgré toutes leurs différences. Jamais mièvre, jamais grandiloquent.