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11 juin 2011

Une séparation

Une_S_parationEt toute la société iranienne apparaît.

Lorsque son épouse Simin le quitte, Nader engage une aide-soignante, la modeste Razieh, enceinte sans qu'il le sache, pour s'occuper de son père atteint de la maladie d'Alzheimer.

A la suite d'une dispute entre Nader et Razieh, celle-ci fait un malaise dans l'escalier après qu'il l'a poussée sur le palier, et elle fait une fausse couche.

Nader se retouve alors accusé de meurtre... Et comme l'époux de Razieh, Hodjat, est psychologiquement très instable depuis qu'il est au chômage, ce malheureux concours de circonstances va tourner au drame, révélant toute la complexité, les doutes, les incertitudes, les petites lâchetés des protagonistes, sous le regard de Termeh, la fille de Silim et Nader.

Après "La fête du feu" en 2007, et surtout l'admirable "A propos d'Elly" en 2009, un nouveau film d'Asghar Farhadi arrive sur nos écrans. C'est à la fois un drame familial et un polar social, poignant de bout en bout, construit avec brio, qui évite tout pathos inutile, au travers desquels les situations des personnages s'ouvrent sur l'histoire collective.

Ce film palpitant d'humanité, tendu, presque électrique, s'articule sur trois niveaux : intimiste, philosophique, et politique. Et l'on y retrouve des personnages forts aux problématiques complexes, devant lesquels se dessinent le quotidien des femmes iraniennes, les différences entres les classes sociales, l'importance de la religion chez certains protagonistes. Et ces trois niveaux de réflexions, parfaitement imbriqués les uns aux autres, offrent au spectateur une intrigue prenante, haletante, qui le ramène à ses doutes, ses petits travers, ses lâchetés, ses mensonges. Le propos est incontestablement universel.

Comme le disait Jean Renoir : "chacun dans ce monde a ses raisons". Et la liberté de ton de Asghar Farhadi et la puissance narrative de sa mise en scène vous cloue sur votre siège, comme si vous étiez devant un excellent thriller étasunien, teinté d'un réalisme de documentaire des plus saisissant.

Ajoutée à toutes ces qualités, il y a la qualité exceptionnelle de l'interprétation. Du côté des femmes, emmenées par Leila Hatami (Simin) et Sareh Bayat (Razyeh) ce fut un Ours d'Argent d'interprétation féminine collectif pour l'ensemble des actrices. Du côté des hommes, emmenés par Peyman Moadi (magnifique en Nader), Shahab Hosseini (très troublant en Hodhat) et Babak Karimi (impeccable en juge) ce fut un Ours d'Argent d'interprétation masculine collectif pour l'ensemble des acteurs.

Presque placée malgré elle en spectatrice, en actrice, en juge de toutes les situations, la jeune Sarina Farhadi, dans son très joli rôle d'adolescente bousculée et hésitante entre son père Nader et sa mère Simin, entre les classes sociales, entre les vérités et les mensonges de chacun, reste une observatrice, à la fois calme et tourmentée, perdue devant cet écheveau si complexe. Elle est passionnante d'incertitudes. A la fin du film, attendez qu'elle sorte de la salle d'audience pendant tout le générique, où la tension est à son comble...

Allez vite à la rencontre de ce film d'un niveau exceptionnel, qui propose un visage renouvelé et pertinent de l'Iran d'aujourd'hui, où vous saisirez parfaitement l'esprit presque névrotique d'une population désorientée par des années de dictature politico-religieuse. De l'intime on accède à l'universel, et chacun un perçoit un peu de soi même.

L'Ours d'Or est amplement justifié.


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