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19 août 2012

Magic Mike

Magic Mike

Le nouveau mâle étasunien.

Mike a trente ans et multiplie les petits boulots : maçon, fabricant de meubles, etc…
Il se rêve entrepreneur. Il est surtout strip-teaseur.
Chaque soir, sur scène, dans un club de Floride, il devient Magic Mike.
Lorsqu’il croise Adam, il se retrouve en lui, l’intègre au club et décide d’en faire le Kid.
Mais le Kid a une sœur, qui n’est pas prête à trouver Mike irrésistible…

Steven Soderbergh a eu l’idée de « Magic Mike » après une conversation avec Channing Tatum, qui lui raconta son parcours, ses multiples petits boulots, et notamment son emploi de strip-teaser à Tempa en Floride, alors qu’i avait 19 ans. Même s’il s’agit donc à la base d’un film inspiré d’une expérience passée réelle, c’est bien une fiction dont il est question. Le but, pour Steven Soderbergh comme pour Channing, était davantage de recréer une atmosphère que de coller à la réalité. Autant dire que c’est une excellente idée. 

IL s’agit d’un récit initiatique très original, plein de sensibilité,d’humanité, de fraternité et de dérision. C’est aussi une observation très acérée de la dépression aux USA, de la nécessité du recours à de nombreux petits boulots pour s’en sortir, à la célébration des corps jusqu’au ridicule, à la prégnance du factice, etc… Le film n’oublie pas de proposer une critique acerbe du rêve américain envolé, comme du show-business.

Alors que « Magic Mike » est un type bien qui essaie d’être à la fois fraternel et paternel avec le jeune Adam pour le guider, qui ne perd jamais de vue qu’il a un projet professionnel sérieux, qui continue d’avoir le cœur sur la main quelles que soient ses difficultés, il demeure pour la plupart un objet de désir.

Le film, aussi bien à travers Mike qu’Adam, montre comment on peut s’égarer en s’entourant des mauvaises personnes, qui fatalement amènent à faire les mauvais choix. 

La mise en scène de Steven Soderbergh est très fluide, décontractée, presque « nonchalante » à l’image d’Adam qui n’imaginait pas, grâce à un boulot de chippendale, pouvoir gagner autant d’argent si facilement. 

Les chorégraphies sont de Alison Faulk, très connue et respectée dans son domaine, notamment pour avoir travaillé avec Madonna et Britney Spears. Elle a eu l’intelligence de faire en sorte que ses chorégraphies soient séductrices, suggestives, parfois romantiques, mais sans oublier de faire en sorte qu’elles soit drôle aussi, en assumant pleinement une forme de mauvais goût. C’est très astucieux. 

Channing Tatum

La distribution est excellente. Channing Tatum évidemment, qui après ses petits boulots successifs est finalement parvenu à jouer dans un clip de Ricky Martin, a réussi une belle carrière de mannequin, pour des marques aussi prestigieuses que Abercombie & Fitch, Nautica, Dolce & Gabanna, Armani, et surtout Pepsi, puis a embrayé sur carrière d’acteur très nourrie depuis 2004 : « Coach Carter » de Thomas Carter en 2004 ; « Sexy Dance » de Anne Fletcher puis « Il était une fois dans le Queens » de Dino Montiel en 2006 ; « Stop Loss » de Kimberley Peirce puis le très bon « Battle in Seattle » de Stuart Townsend en 2007 ; l’excellent « Public Ennemies » de Michael Mann,  « G.I. Joe » de Stephen Sommers puis « Fighting » de Dito Montiel en 2009 ; « Cher John » de Lasse Hallström en 2010 ; « L’aigle de la Neuvième Légion » de Kevin McDonald en 2011… Et il a rien de moins que 15 films à sortir prochainement, et s’il fait les bon choix, il pourra s’assurer un parcours assez semblable à celui de Mark Wahlberg.

Là où Channing Tatum est très bon, c’est dans la façon dont il joue avec son corps et sa virilité, dans un amusement et une aisance évidents, mais surtout dans une certaine forme d’humour, de second degré, pour mieux faire ressortir le fond bonhomme de son personnage.

Alex Pettyfer

Pour incarner le rôle de Channing Tatum à 19 ans (Adam, « The Kid »), le choix de Steven Soderbergh s’est arrêté sur Alex Pettyfer, jeune comédien britannique, enfant de la balle, fis d’un père acteur et d’une mère mannequin, qui s’est fait connaître dès 16 ans en 2005 téléfilm « Tom Brown’s Schoolday » auquel ont notamment succédé « Wild Child » de Nick Moore en 2008, « Tormented » de Jon Wright en 2009, « Time out » de Andrew Niccol en 2011. Nous le retrouverons bientôt face à Forest Whitaker et John Cusack dans « The Butler » de Lee Daniels, puis dans « Cali » le prochain film de Nick Cassavetes. 

Il incarne « The Kid », sous la protection à la fois fraternelle et paternelle de Magic Mike, susceptible de prendre sa succession, et si son rôle est si intéressant, c’est qu’il est face aux affres et aux appétits de la jeunesse, qu’il n’a pas encore le détachement de son mentor, qu’il est sujet à diverses influences emporté par sa fougue. Alex Pettyfer parvient à proposer une gamme très large d’attitudes tant son personnage est désireux de plaire, se faisant caméléon, en fonction de la personne face à laquelle il se trouve. Le personnage de Magic Mike l’y contraint, étant en quelque sorte, alternativement, son mentor, son protecteur, son grand frère, son père…

Le rôle de Dallas, le patron de cette troupe de chippendales, on retrouve Matthew McConaughey, qui livre ici une véritable performance en meneur de troupe. Alors que sa carrière a brillamment commencé en 1996 dans « Lone Star » de John Sayles il a joué dans une quantité incroyable de films oubliables, d’où émergent uniquement « Le droit de tuer » de Joel Schumacher, l’excellent « Tonnerre sous les tropiques » de Ben Stiller en 2008, et « La défense Lincoln » de Brad Furman en 2011. Ce relatif gâchis pourrait bien se clore grâce à son excellente et survoltée prestation dans « Magic Mike ». C’est très souhaitable, car c’est un très bon comédien. Et puisqu’il a 10 films à venir, dont « Killer Joe » de William Friedkin, « The wolf of Wall Sreet » de Martin Scorsese et « Knights of Cups » de Terrence Malick – excusez du peu – il y a fort à parier pour que le souhaite devienne réalité.

Joe Manganiello

Joe Manganiello incarne « Big Dick Richie » (no comment), un autre membre de la troupe de chippendales. Il a joué dans de très nombreuses séries TV (Les Experts, Urgences, FBI duo très spécial, Les Frères Scott, etc…), et on l’a vu sur grand écran, notamment, dans le rôle de Flash Thompson dans la trilogie « Spiderman », puis face à Cameron Diaz et Jennifer Lopez dans « Ce qui vous attend si vous attendez un enfant ». Il joue avec beaucoup de malice ce strip-teaser contraint de gonfler son sexe avec une espèce de pompe avant d’entrer en scène, afin que son pseudonyme ne soit pas usurpé. Là encore, de la part du réalisateur, c’est un autre questionnement sur la masculinté, sur le rôle du mâle américain, contraint non seulement à la compétitivité permanente, à gagner beaucoup d’argent, mais aussi d’afficher les attributs que l’on attend de lui.

 

 

Matthew Bomer

Enfin, Matthew Romer incarne Ken, un autre membre de la troupe. Lui aussi a fait ses classes dans de nombreuses séries TV, dont « FBI duo très spécial » , « Chuck » et « Glee » (saison 3). Au cinéma il fugurait au générique de « Time Out » de Andrew Niccol en 2011, aux côtés de Alex Pettyfer. Nous le retrouverons bientôt dans « 8 » de Dustin Lance Black aux côtés de George Clooney et Brad Pitt, puis en 2014 dans « The Normal Heart » de Ryan Murphy (créateur et/ou scénariste et/ou producteur des séries « Nick/Tup », « Glee », « American Horror Story », « The New Normal »), dans le rôle de Felix Turner, le petit-ami de l’écrivain Ned Weeks. Il s’agit de l’adaptation de la pièce de Larry Kramer, relatant l’activisme du couple gay à New York au début de l’épidémie de Sida (1981-1984). Après sa participation à « Magic Mike », le rôle de Felix Turner, si le film est bon, devrait accroître encore sa notoriété et ses perspectives de carrière. 

Steven Soderbergh - à qui dans « Magic Mike » je ne fais qu’un seul reproche, l’inutile, sinon carrément encombrante, love story entre Mike et Brooke (la sœur d’Adam) incarnée par la charmante et fraîche Cody Horn – a eu ici une très bonne idée de film en écoutant le parcours de Channing Tatum, a trouvé un cadre très original pour interroger la masculinité de l’homme étasunien en temps de crise sociale, par le truchement du chippendale (homme objet par excellence), tournant radicalement le dos aux éternels rôles de flics, d'espions, de voyous, de super-héros, etc…

magic-mike-movie

Ce type de portraits masculins a été esquissé par les Sean Penn, George Clooney, Brad Pitt, Matt Damon, etc… et leurs rôles, depuis quelques temps déjà, mais Steven Soderbergh, non sans humour, décide ici d’approfondir le propos qui consiste à décrire la mutation du "mâle" en temps de crise, en le piquant des prismes économique, financier, social, sociétal et culturel. Et il le fait sans une once de prétention.

Et malgré les photographies volontairement « homo-érotiques » dont j’ai illustré ma chronique, le propos du film reste d’une incroyable pertinence, en essayant de dessiner les contours du nouveau mâle étasunien (ou du nouveau mâle tout court ?), loin des caricatures sociologiques tels que les « métro-sexuels » ou les « ûber-sexuels », parce qu'il y met beaucoup de drôlerie.

Je recommande vivement "Magic Mike", selon moi le meilleur film de Steven Soderbergh depuis longtemps.

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