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11 juin 2013

La Fille du 14 Juillet

La Fille du 14 Juillet

Fuir la morosité.

Hector (Grégoire Tachnakian) qui a rencontré Truquette (Vimana Pons) au Louvre le 14 juillet, n’a qu’une préoccupation : séduire cette fille qui l’obsède. Le meilleur moyen c’est encore de foncer l’emmener voir la mer et Pator (Vincent Macaigne) ne saurait lui donner tort, surtout si elle est accompagnée de sa copine Charlotte (Marie-Lorna Vaconsin)…

Flanqués de l’inévitable Bertier (Thomas Scmitt) le frère de Charlotte, ils empruntent les petites routes de France dont les caisses sont vides. Car c’est la crise ! Il faut remettre la France au boulot et, en plein été, le gouvernement décide d’avancer la rentrée d’un mois.

Un chamboule-tout et quelques liasses de billets plus tard, le groupe se disloque à l’image d’une France coupée en deux, entre juillettistes et aoûtiens jaloux. Mais rouler en sens inverse du travail n’effraie pas le trio restant, bien décidé à retrouver La Fille du 14 juillet et à vivre un été débraillé.

Vaconsin Tachnakian Macaigne

Si le cinéma d'Antonin Peretjatko (véritable touche à tout, scénariste, monteur, ingénieur du son, il réalisé des courts métrages remarqués, "Paris Monopole" et surtout "Les Secrets de l'Invisible" que j'ai adoré) passe souvent pour un cinéma improvisé, il s'agit d'une idée reçue que tient à corriger le réalisateur : "Il n’y a rien de plus faux. C’est écrit à la virgule près. Comme le plan de travail est très lourd, je ne pars jamais en tournage sans un découpage précis, avec un repérage des décors, un plan au sol pour la position de la caméra, parce que sinon je sais que je vais perdre énormément de temps", déclare-t-il.

Le réalisateur a incorporé dans le film des images d'actualité (et celles du défilé du 14 Juillet sont particulièrement désopilantes), mais qu'il a tournées lui-même, proposant ainsi sa vision très personnelle du réel.

Le réalisateur est attaché à un travail traditionnel sur l'image : "Le film a été tourné en 16 mm, de même que mes courts ont tous été tournés sur support argentique. C’est une économie et une esthétique dans lesquelles je suis à l’aise", explique-t-il. Ce choix lui a notamment permis de se démarquer des réalisateurs privilégiant le numérique. Il se plaît à volontairement garder chaque faux raccord et incohérence qui pourrait survenir lors d'un tournage : "Je cherche à ce que ça ripe un peu à chaque fois qu’on passe d’un plan à l’autre, à éviter le raccord parfait", confie-t-il. "Il ne s’agit pas de bâcler mais de poser des postulats esthétiques, ça donne un effet "débraillé" ou "foutraque" totalement assumé. Ma hantise est de perdre cette malfaçon aux finitions du film en lissant tout."

Il me faut citer tous les comédiens, particulièrement bons : Vimala Pons (Truquete), Grégoire Tachnakian (Hector), Vincent Macaigne (Pator), Marie-Lorna Vaconsin (Charlotte), Thomas Schmitt (Bertier), Serge Trinquecoste (Docteur Placenta), Philippe Gouin (Marcello), Lucie Borleteau (Gretchen), Pierre Merejkowski (Pierre), Claude Sanchez (Madame Placenta)... liste à laquelle s'ajoutent les délicieuses appartitions de Albert Delpy et Bruno Podalydès.

Vimala Pons

Serge Trinquecoste

Je souhaite évoquer trois d'entre eux : d'abord Vimala Pons dans le rôle de Truquette, qui est épatante de fraîcheur. Peu connue du grand public, elle fut aux génériques de "Président" de Lionel Delplanque avec Albert Dupontel, "36 Vues du Pic Saint-Loup" de Jacques Rivette, "Bazar" de Patricia Plattner avec Bernadette Lafont et Lou Doillon, "Adieu Berthe" de Bruno Podalydès. Je suis certain que sa carrière devrait pouvoir se déployer tant elle a de cordes à son arc.

Ensuite, dans le rôle du Docteur Placenta (un médecin qui exerce depuis 1968 sans diplôme !), l'incroyable Serge Trinquecoste (un acteur de théâtre) qui joue avec un enthousiasme et un art du comique de très haute volée. Quand je pense à tous ces acteurs qui se veulent drôles, mais qui n'ont pas le commencement du début du talent de ce comédien incroyable...

Macaigne Vincent

Vincent Macaigne

Enfin, mon préféré, Dans le rôle de Pator, le passionnant Vincent Macaigne. Selon moi, c'est un virtuose ! D'abord, j'avais vu l'an dernier son court métrage de 40 minutes, "Ce qu'il restera de nous", sur une relation entre deux frères, que j'avais adoré. À juste titre semble-t-il, puisqu'il a obtenu le Grand Prix au Frstival International du Court Métrage de Clermont Ferrand, et que Thibault Lacroix s'est vu recevoir le Prix d'Interprétation Masculine au Festival Silhouette 2012. Il a souvent obtenu des seconds rôles dans lesquels il excelle toujours : "La Répétition" de Catherine Corsini en 2001, "De la guerre" de Bertrand Bonello en 2007, "Un été brûlant" de Philippe Garrel en 2010, "Un monde sans femmes" de Guillaume Brac en 2011. Il est fort probable que 2013 soit "son" année, puisque sortiront prochainement "Tonnerre" de Guillaume Brac, "La Bataille de Solférino" de Justine Triet, "Eden" de Mia Hansen-Love, "2 automes, 3 hivers" de Sébastien Betbeder. Avec ses faux airs de Vincent Tellier, son physique presque colossal en total décalage avec sa finesse, sont talent incroyable à être décalé, je ne doute pas un instant de sa carrière à venir.

Ce genre de cinéma, a priori, peut ne pas plaire à tous, et c'est dommage tant il regorge de trouvailles, de liberté de ton, de fraîcheur, de drôlerie. Je l'inscris pour ma part aux côté d'Emmanuel Mouret ("Changement d'Adresse", "Un baiser s'il vous plaît", "Fais-moi plaisr ", "L'Art d'Aimer"), du génial trio Fiona Gordon/Dominique Abel/Bruno Romy ("L'Iceberg", "Rumba", "La Fée"), et de Solveig Anspach qui nous a récemment proposé l'iconoclaste "Queen of Montreuil" que j'admire beaucoup.

C’est le privilège des très bonnes comédies burlesques de n’appartenir qu’à un espace exclusivement visuel qui se passe presque de dialogues et totalement d’explications. Artificier virtuose, Antonin Peretjatko a une manière unique de faire dérailler ses scènes, raccrochant les wagons comme on s’arrimerait à un avion en chute libre. Il lance un premier long métrage au moteur vrombissant à l'assaut d'une époque léthargique et frigide.

Derrière la légèreté d'une comédie d'été se profile la stature d'un réalisateur ambitieux au premier film très enthousiasmant. Les aventures de Truquette et de sa bande de copains foutraques, au coeur d'un été comme on les rêve, mélange de poésie décalée et hommage à la liberté. Voilà, c'est un film débraillé pour retrouver l'envie d'aimer ; un film libre, tout simplement.

Courez vite voir "La Fille du 14 Juillet", et vous sortirez des sentiers battus et rebattus ! C'est une petite merveille !

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Commentaires
C
Frais, cet article!
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