Gerontophilia

Confusion des genres, confusion des âges...

Lake (Pier-Gabriel Lajoie, d'une beauté fracassante), 18 ans, un garçon plutôt ordinaire, vit avec Marie, sa mère névrosée (Marie-Hélène Thibault) et sort avec Désirée (Katie Boland) une fille de son âge, un peu excentrique qui juge les gens et le monde en fonction de leur militantisme féministe.

Mais il se découvre un penchant de plus en plus fort pour... les vieux messieurs. Embauché grâce à sa mère dans une maison de retraite pour l’été, il tombe sous le charme de M. Peabody (Walter Borden, époustouflant), un séduisant patient de 82 ans.

Je compte les films de Bruce LaBruce parmi des films de toute première importance. "No Skin off My Ass", "Siper 8 1/2", "Hustler White", "Come as you are", "The Raspberry Reich", "L.A. Zombie" (avec François Sagat), même avec leurs budgets n'excédant pas 50.000 dollars canadiens ont posé les jalons d'un cinéma, certes un peu "underground" et interlope, capable de bousculer les barrière d'un certain ordre établi.

Pour ma part, "Hustler White", même s'il s'articule autour de la prostitution masculine sur Monica Boulevard à Los Angeles, propose une très belle histoire d'amour ; "The Raspberry Reich", même en proposant un militantisme gay à la façon d'une drôlissime "intifada gay" (je cite), reste un acte politique contestataire voisin du mouvement punk.

Ici, aidé par son ami Gus Van Sant, avec un budget d'un million de dollars canadiens, si l'univers est moins "trash", le propos de perds rien en pertinence et n'affadit pas son propos, loin s'en faut. La caméra est moins hasardeuse, les cadrages sont soignée, les comédiens font de la haute voltige, et il en ressort un film qui mérite une audience élargie.

On y découvre le sublime Pier-Gabriel Lajoie qui campe un Lake qui ne cède rien à ses désirs et à ses sentiments, le délicieux Walter Borden qui campe un facétieux Mister Peabody particulièrement séduisant. Menés par Bruce LaBruce, ils nous propose un passionnant questionnement sur l'âge, sur le désir, sur le temps qui passe, sur le jugement des autres, sur les oeillères du monde, sur la nécessité de s'épanouir en dépit d'un pesant joug sociétal.

Ce que contient ce film sera inévitablement "repris" ici ou là, et même de façon "expurgée" des réalisateurs et des acteur de grande renommée porteront le même propos, les mêmes observation, attarderont leur caméra au plus près des corps et des peaux, interrogeront le beau questionnement sur la "légitimité" des désirs, mais sauront-ils nous convaincre, comme le font ici Bruce LaBruce, Pier-Gabriel Lajoie et Walter Borden, que cet improbable amour, que cet impensé, doit être chéri.

Un film que je recommande vivement.